Actualités juridiques et fiscales

La réorganisation internationale

Organiser son groupe à l’international ?

Un chef d’entreprise peut être tenté d’organiser son Groupe à l’international pour développer les activités internationales et le faire depuis l’étranger, la France n’ayant vocation qu’à exercer et développer ses activités au seul plan interne.

Plusieurs raisons stratégiques peuvent justifier une telle démarche.

En pratique, le dirigeant, tout en restant résident fiscal français, pourra transférer le siège de sa Holding à l’étranger ou apporter les titres des sociétés préexistantes à une Holding étrangère.

Au plan fiscal, ces opérations seront très supportables :

Si un transfert de siège de la Holding française est envisagé

L’Exit Tax français des personnes morales sera applicable et les plus-values latentes seront imposées avec un étalement sur 5 ans. En pratique, « l’amendement Copé » sera applicable si les participations de la Holding sont détenues depuis plus de 2 ans. Ainsi, la fiscalité sera de 4% étalable sur 5 ans. Anecdotique.

Si un apport des titres est privilégié

Le report des plus-values sera acquis de droit pour l’associé sous réserve d’indication des plus-values en report chaque année dans sa déclaration de revenus. Une attention particulière sera portée sur:
– le nombre de sociétés intercalées entre la société opérationnelle française et la Holding tête de groupe (limité à 2) ;
– au nombre d’opérations d’apports successives avec cumul des sursis/reports et reports/reports qui sont limités depuis une instruction de juillet 2015 à 2 opérations ;
– à la problématique des soultes de moins de 10% qui pourront être perçues sans fiscalité ni charges sociales lors de cet apport sous réserve de l’abus de droit qui pourrait être invoqué par l’administration fiscale française depuis le 3 juillet 2015 si l’ensemble des apporteurs bénéficie de ladite soulte.

Cette nouvelle entité étrangère devra répondre à des critères relativement stricts pour éviter tout risque fiscal de requalification par la France, notamment en terme de notion d’établissement stable de la structure étrangère en France ou à l’inverse de substance insuffisante de cette dernière à l’étranger. A cet égard, nous vous invitons à lire notre article récent sur l’arrêt Wagons lits. Très concrètement, les impératifs de substance nécessiteront des coûts annuels minimum qui peuvent être estimés entre 50 K€ et 60 K€ (locaux, immobilisations, abonnements, frais fixes, salarié, etc…).

 

Cette tête de groupe pourra être nommée dirigeante des différentes filiales, notamment la ou les filiales françaises pour peu que ces dernières aient un statut de SA ou de SAS (le gérant d’une SNC ou d’une Sarl doit impérativement être une personne physique).

A ce titre, elle percevra de ses filiales une rémunération de dirigeance qui sera déductible fiscalement de l’Impôt sur les sociétés en France. Ainsi, le coût apparent de la structure étrangère ne sera plus que de 2/3 des 60K€ estimés, soit environ 40K€ par an.

Cette même Holding pourra réaliser différentes prestations administratives ou stratégiques (rémunérées) au bénéfice de ses filiales. Elle sera redevable de la TVA à l’étranger et aura un numéro de TVA INTRACOM mais ses honoraires seront à autoliquider par les filiales assujetties en France et la Holding étrangère n’aura en pratique qu’à souscrire sa déclaration douanière d’échange de service (DES) dans son pays.

De même, il conviendra d’envisager de réserver l’animation du Groupe à cette Holding étrangère et de s’aménager la preuve de la réalité de l’animation (rémunération, PV, registre d’animation, comptes rendus des filiales), pour des raisons fiscales internes comme l’exonération d’ISF au titre des biens professionnels, engagement de conservation Dutreil, etc.

Ce chef d’entreprise pourra conserver dans la filiale française un salaire pour des fonctions techniques (commercial, développement, recherches, autres) qui lui assurera une rémunération taxée en France et une couverture sociale.

Au titre de la substance de la Holding, il devra se déplacer régulièrement au siège de la Holding pour y prendre l’ensemble des décisions la concernant et concernant le Groupe. Cette Holding sera dirigée par des dirigeants français et par des dirigeants locaux afin de purger toute discussion éventuelle sur le lieu où les décisions ont été prises. A ce titre et en sa qualité de dirigeant de la Holding (co-gérant s’il s’agit d’une Sarl ou administrateur s’il s’agit d’une SA), il percevra localement une rémunération dénommée « tantièmes » et correspondant à la notion interne des jetons de présence.

Au Luxembourg, ces tantièmes font l’objet d’une taxation forfaitaire dans la limite de 100 K€/dirigeant et par an : la société acquittera un prélèvement libératoire de 20% couvrant tant la fiscalité que les charges sociales.

La convention fiscale France/Luxembourg réserve l’imposition des tantièmes au pays de la société versante, si bien que ces tantièmes qui pourront être perçus sur un compte bancaire français n’auront pas à subir l’impôt sur le revenu en France. Seule une déclaration de ces sommes, à titre d’information, sur la déclaration de revenus annuelle devra être faite pour des raisons de progressivité des tranches imposables.

L’intérêt d’une telle prise de rémunération n’est pas neutre surtout si on la compare à la situation où le chef d’entreprise relèverait du RSI :

 

Pour deux tantièmes (le mari et son épouse par exemple), le gain est d’environ 100 K€ par an tous frais de la Holding étrangère déduis (liés à la substance).

De même, chaque année, les filiales pourront distribuer des dividendes au bénéfice de leur Holding sans aucun frottement fiscal ni en France, ni au niveau de la tête de groupe établie dans la CEE alors que de telles distributions au profit d’une Holding française entraineraient un impôt de 1,66% des distributions puisque la France est le seul pays européen à connaître une réintégration fictive au titre d’une quote part pour frais et charges de 5% en base.

Une telle organisation pourra également avoir une incidence positive sur les obligations déclaratives nouvelles que le Parlement tente de mettre en place dés 50 M€ de CA.

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